Vendredi 3 juin. C’est vers toi Maryvonne que ce matin vont mes pensées, toi qui, avec patience et bienveillance, m’as appris le peu d’espagnol que je possède. Ce soir je dors à Roncesvalles et je compte bien mettre ton enseignement en pratique. En attendant il me faut y arriver. J’ai tellement lu de récits terrifiants sur le passage de ce col. A commencer par celui de Roland le Preux qui s’époumonait à souffler dans son cor. Mais aussi sur ceux de pèlerins affrontant l’orage, les éclairs, la neige et que sais-je encore. Quand je quitte Saint -Jean-Pied-de-Port en traversant la Nive, le ciel est gris et bas. Très vite, après deux heures de marche je pénètre dans un épais brouillard qui masque souvent les balises. Pourtant je ne risque pas de me perdre. On m’avait promis 300 pèlerins aujourd’hui et ils sont bien là, montant en procession à travers la brume. Que viennent-ils chercher sur mon chemin tous ces anonymes. Désormais ce n’est plus la tranquillité de ces jours dernier. J’entre dans la partie la plus fréquentée du camino. Arrivé au refuge Orisson je m’accorde une petite pause. Je croise Véronique, fervente pèlerine rencontrée à Ostabat et j’ai la chance d’y retrouver Marie, seule, sans Julie restée un jour à St Jean. Elle est comme moi, perdue, déstabilisée par tout ce monde et, tacitement, nous allons faire route ensemble, ignorant tout ce tohu-bohu. En discutant le temps paraît moins long et la pente moins raide. Bientôt le soleil cherche à percer le brouillard et c’est sous un magnifique ciel bleu que nous atteignons le col Lepoeder. En bas, dans la vallée, Roncevaux nous tend les bras. Sans en avoir l’air le col légendaire est maintenant derrière nous. Il est 14 heures et deux heures plus tard, je laisse Marie devant la collégiale royale, imposant monastère datant du XII ème siècle. Elle continue plus loin à la recherche d’un camping, mais on se promet de se revoir plus tard. Quant à moi, fourbu mais heureux d’être là, je suis impatient, comme un enfant, de découvrir la Navarre.

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1 thought on “RONCESVALLES”

  1. Bonsoir,
    Je viens de lire a voix haute pour Genevieve tes derniers jours… et en partageant ton periple, nous etions emus… j’ai eu une pensee pour claude michelet, l’ecrivain-paysan « des grives aux loups »…un presque-pays des terres que tu viens de traverser… et apres tu parles de Roncevaux, il y a quelques jours j’ai ecoute la vraie histoire de cette triste aventure…tout y est: la felonie, la trahison, l’abandon…ainsi, en quelques instants, tu nous as montre les differents versants de la nature humaine: l’entraide, la gentillesse, la douceur, la violence, la traitrise… l’ homme dans toute sa complexite…
    Merci patrick pour ce partage…
    Tu abordes la derniere partie…bravo!
    Prends soin de toi.
    Avec toute notre affection
    Bises

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